'évêque
Silve fit entreprendre vers la fin du IV° s. l'édification d'une
nouvelle basilique-martyrium.
Comment connaître l 'architecture de cette église disparue ?
L'abside en arc de cercle outrepassé
de dimension moyenne ( 6 m de diamètre intérieur ) retrouvée
en 1970 dans la crypte haute de l'actuel Saint-Sernin lui appartient si l'on
considère que le sarcophage de Saturnin demeura dans son sol depuis
la translation d'Exupère jusqu'en 1258.
Elle fut enveloppée par l'abside majeure de l'église de la fin
du XI° s., de telle sorte que le diamètre intérieur du rond-point
roman correspond à peu prés au diamètre extérieur
de l'abside paléochrétienne.
En fait, seuls l'admirable chevet, le transept avec la tour de croisée,
les doubles collatéraux de la nef et les dernières travées
du vaisseau central datent de l'époque romane, ayant été
élevés durant le dernier quart du XI° s. et le premier quart
du XII° s.
D'environ 1070 à 1080,
on commença à élever la partie orientale de la nouvelle
église.
En 1096, ce capitis membrum ( déambulatoire et son rond-point,
transept et ses chapelles ), ainsi désigné dans un texte relatif
à la vie du chanoine administrateur du chantier Raimond Gairard, était
quasiment terminé.
Le chapitre put alors engager le maître d'uvre ( dont le nom nous
est inconnu ) à se lancer dans la construction du Corpus, la deuxième
partie de l'édifice, qui comprend la nef et ses collatéraux
ainsi que la façade occidentale avec ses deux tours.
Le reste de la nef n'a été terminé qu'au début du XIV° s., en pleine période gothique. Il convient donc de s'interroger sur la manière dont on avait alors traité les parties hautes de l'édifice.
Le terme " roman " ( du latin
romanus, de Rome ) est créé en 1818 par un architecte
normand, Charles de Gerville pour qualifier l'architecture de l'occident
chrétien du V° au XII° siècle.
De nos jours, ce mot désigne exclusivement la production artistique
des XI° et XII° siècles.La dernière phase de l'art
roman, qui se prolonge dans certains pays jusque vers 1250, correspond déjà,
en Île-de-France, aux premières réalisations des bâtisseurs
gothiques.
Après l 'an mille, l'architecture
connaît un grand essor en Occident.En ces temps de famines, d'épidémies
et d'appréhension de la fin du monde, la peur ou la reconnaissance
incitent les hommes à élever de très nombreux édifices
religieux; mais dés la fin du X° s.. se manifestaient déjà
les premiers signes d'une renaissance architecturale.
Cependant, il est certain que le XI° s. est une période d'exceptionnelle
fécondité, marquée par un progrès rapide dans
tous les domaines de l'activité humaine.
Après la création en 962 du Saint Empire romain germanique
se constitue en 987 la monarchie capétienne, qui, d'abord
faible, consolide peu à peu son autorité. L'essor démographique
et le renouveau des échanges commerciaux sont à l'origine
du développement de la vie urbaine.Ce remarquable déploiement
d'activité a une répercussion immédiate sur la naissance
de l'art roman, que facilite l'action de nouveaux ordres monastiques et
d'éminents personnages.
En 910 est créé Cluny, qui rayonne bientôt
sur toute la France, le Nord de l'Espagne et de l 'Italie.
De profonds élans de ferveur religieuse animent les chrétiens
qui s'acheminent vers Jérusalem, Rome, Saint-Jacques-de-Compostelle
ou d'autres sanctuaires pour vénérer de saintes reliques,
et qui, désireux de libérer la Terre sainte, répondent
avec enthousiasme à l'appel du pape Urbain II, prêchant
à Clermont-Ferrand en 1095 pour le première croisade.
Ces conditions spirituelles et matérielles aident à comprendre la formation de l 'art roman et l'ampleur de son développement, mais ses origines stylistiques restent à définir.
S'il inaugure une nouvelle ère, il
est loin de rompre avec les premiers temps du Moyen-Age. Il procède
de l'art carolingien comme des traditions romaines et gallo-romaines, auxquelles
se mêlent des influences orientales, barbares, celtes et musulmanes,
surtout dans la décoration.
Le " premier art roman " est caractérisé
par des constructions en petit appareil de pierres cassées au marteau,
imitant la brique, et surtout par un décor extérieur très
particulier et constamment employé, formé d'arcatures aveugles
et de minces pilastres dits " bandes lombardes " ou "
lésènes ".
Cette ornementation se développe sur les absides et les murs latéraux,
sur les façades et les clochers, dont elle rythme les étages,
et s'accompagne souvent, au-dessus des corniches, d'une succession de niches
aveugles ou de dents d'engrenage.
Les édifices religieux ont d'abord une grande simplicité de
plan et de parti, dérivés parfois des formules carolingiennes.
Ce sont de petites églises sans transept, couvertes en charpente,
à une ou trois nefs terminées par des absides voûtées.
Mais bientôt apparaît une innovation capitale: la voûte,
dont l'usage, d'abord limité aux cryptes et aux sanctuaires, s'étend
ensuite aux grandes nefs. Le voûtement de toutes les parties de l'édifice,
qui commande ses proportions, son éclairage et son aspect général,
est l'un des traits les plus typiques de l'architecture romane.
Certains édifices combinent plusieurs procédés : voûtes
d'arête, berceaux transversaux, longitudinaux, annulaires, demi-berceaux,
coupole.
La vallée de la Loire voit naître certaines formules originales, comme le déambulatoire à chapelles rayonnantes. En Normandie, Notre-Dame de Jumièges, élevée au milieu du XI° s., offre des solutions très nouvelles : l'alternance des supports, la division en travées verticales, l'élévation intérieure caractérisée par la proportion décroissante des étages ( grandes arcades, tribunes, fenêtres hautes ),le chur à déambulatoire et la couverture en charpente sur la nef, seront, avec des variantes, parmi les traits distinctifs de l'art normand.
Ainsi se constituent au XI° s. les données
d'un art riche et varié, puisant à des traditions anciennes,
mais les renouvelant par de nombreuses innovations et d'audacieuses expériences.
Les architectes ont cherché à résoudre le problème
du voûtement en pierre et de l'éclairage des nefs et ont multiplié
les recherches d'ordre esthétique ou pratique en ce qui concerne
les plans, les élévations et les ordonnances générales,
préparant ainsi directement l'épanouissement du style roman
dans le dernier tiers du XI° et au XII° siècle.
Si les deux premiers tiers du XI° siècle
sont une période féconde de formation et d'expériences,
la fin du siècle et le siècle suivant sont l'époque
des grandes réalisations par lesquelles le génie roman exprime
avec plénitude sa maturité.
Dés la fin du XI° s., l'église romane apparaît comme
l'expression achevée d'un programme architectural adapté à
la fonction religieuse et sociale de l'édifice, accordée à
des préoccupations esthétiques et techniques.Presque partout
désormais, au lieu de matériaux de formes diverses cassées
et noyées dans le ciment, sont utilisées des pierres de taille
soigneusement appareillées.
La plupart des églises, dont le plan est en croix latine et qui sont
parfois munies d'un narthex, ont une nef avec ou sans collatéraux,
un transept simple ou double, un chur développé pour
faciliter la circulation des fidèles et le déroulement des
grandes cérémonies.